mercredi 16 novembre 2016

Pan




Fils de Zeus et de la nymphe Callisto, le dieu Pan, principalement adoré en Arcadie, présidait aux troupeaux et passait pour l'inventeur d'un instrument de musique qualifié de chalumeau. Muni de cornes, de pieds de chèvre et d'une petite queue, on lui donnait pour compagnons les égypans, les faunes et les satyres, et il passait pour un grand amateur de filles vierges et de jeunes éphèbes:

Pan piedebouc, couronné de Rocquette
De grand luxure est symbole, ou marquette,
Rocquette est chaude, et bouc luxurieux,
Et les Satyres et Nymphes amoureux,



écrit Alciat dans ses Emblèmes (1557), tout en précisant que l'herbe rocquette est "esmouvante à paillardise". Certaines nymphes, telles Syrinx et Echo, avaient cependant repoussé ses avances. Est-ce de là soudaine provoquait parmi les voyageurs et les populations superstitieuses des montagnes de la Grèce? Considéré à la fin du monde antique comme le Grand Tout, la vie universelle, il fut rapidement assimimé à un démon, puis au Prince des incubes ayant Lilith pour parèdre. Enfin le président d'Espagnet dans un poème composé en l'honneur de De Lancre, son confrère en démonologie, n'hésita pas, en 1622, à le comparer à Satan en personne:

Voyez le trône d'or du Tyran orgueilleux
Qui rend aux assistants son regard merveilleux,
Terrible et sanguinaire,
D'un gosier altéré du sang de ses sujets,
Ebranlant sa crinière
A la memê façon que Pan dieu des forêts.

Pour les psychanalystes, Pan représente la Libido. Il est "le symbole de l'élan vital, de toutes les forces de la nature débordante de la vie en face de laquelle l'homme-enfant se sent écrasé, bien qu'il ait cherché par la magie et la science à dompter ces énergies qui représentaient si bien ses instincts refoulés".


jeudi 10 novembre 2016

Alcyoné



Fils d'Ouranos et de Gaïa, ce Géant, appartenat à la mythologie grecque, mourut d'une flèche lancée par Athéna, lors du combat qui opposa ses congénères aux divinités de l'Olympe. Le théosophe Louis-Claude de Saint-Martin voyait en lui un frère aîné de Satan: "Qui ne reconnaîtra dans Alcyonée, dans ce géant fameux qui secourut les dieux contre Jupiter, qui fut jeté par Minerve hors du globe de la Lune où il s'était posté, et qui avait la vertu de se ressuciter; qui n'y reconnaîtra, dis-je, l'ancien Prévaricateur, exclu de la présence du Principe suprême, réduit à l'horreur du désordre et enchaîne dans une enceinte ténébreuse, où des forces supérieures ne cessent de le contraindre et de molester sa volonté toujours renaissante?


Lycanthropie



Terme générique s'appliquant à la transformation momentanée d'un être humain en animal. Ce nom viendrait de Lycaon, souverain mythique d'Arcadie, qui aurait servi à Zeus, au cours d'un banquet, les membres d'un enfant qu'il venait d'égorger et avait fait cuisiner.


Pour le punir, le dieu le transforma en loup, le contraignit à hurler au milieu des campagnes, tout en lui conservant ses facultés intellectuelles. Par extension, on désigne, sous le nom de lycanthropie, une maladie mentale (lypémanie) où les sujets se croient transformés en chiens (cynanthropie), en boeufs (bousanthropie), ou en n'importe quel autre animal.
Les innombrables récits légendaires rapportés ou inventés par les auteurs païens de l'Antiquité gréco-romaine: l'Odyssée d'Homère, les Métamorphoses d'Ovide, l'Ane de Lucius de Patras, le Satiricon de Pétrone, l'Ane d'or d'Apulée, pour ne mentionner que les plus connus, et l'exemple de Nabuchodonosor, tous pris au pied de la lettre par les démonologues, renforçaient la croyance en ces transformations.


N'admettaient-ils pas l'existence réelle du Minotaure, né des amours de Pasiphaé et d'un taureau? Ne traitaient-ils pas tout bonnement Circé de sorcière, à  l'instar de celles de leur temps? La métamorphose la plus fréquemment remarquée, alors que ces fauves continuaient de répandre la terreur dans les campagnes européennes, était celle de l'homme en loup-garou. Nom dont l'origine demeure d'ailleurs controversée. "Les Allemands les appellent Werwolf, écrit Bodin; les Français loups-garous; les Picards loups-varous comme qui dirait lupos varios... Les Grecs les appelaient lycanthropes et mormolycies; les Latins les appelaient varios et versipelles... François Phoebus, comte de Foix, en son livre de la Chasse dit que ce mot de garous veut dire gardez-vous". Dans le Poitou et en Gironde, les loups-garous sont qualifiés de bêtes bigournes... En Dordogne ils deviennent libérous et dans le Berry loups berous. En Bretagne on les nomme bisclaverets; en Normandie, garwalls: Robert le Diable y est désigné comme un warou.


La multiplicité de ces dénominations prouve combien la peur des loups-garous était ancrée dans les esprits, alors même que théologiens et démonographes cherchaient à savoir de quoi cette maladie mentale, cette insania lupina, dépendant réellement. Féru d'Antiquité et se retranchant derrière saint Augustin, Jean Bodin affirmait la réalité corporelle des transformations et prétendait, par exemple, que, par une permission spéciale de la divinité, Nabuchodonosor s'était vu mué en boeuf, comme la femme de Loth était devenue statue de sel. Saint Jérôme et saint Thomas prenaient le contre-pied de pareille opinion, estimant que le souverain avait perdu la raison, sans que sa substance physique ait été modifiée. Il semble que la première opinion ait bénéficié d'un maximum de suffrages, car on la retrouve exprimée dans le Marteau des sorcières où l'on apprend qu'un homme fut trois ans durant contrait par des maléfices à porter les fardeaux d'une stryge irascible: "Enfin, au bout de ce temps, passant devant une institution religieuse, au moment où l'on célébrait la messe, et n'osant pas entrer de peur d'être roué de coups, il se tint devant... et les élevant au ciel". La sorcière une fois punie, l'homme retrouva sa forme normale, affirment donc Sprenger et Institor, les auteurs de ce manuel, qui, à l'extrême du Moyen Age, reprennent en les christianisant les légendes de Lucius, Apulée et Lucien. 
Il convient, par ailleurs, de noter que les démons n'hésitaient jamais à emprunter la forme animale pour rencontrer les humains en rase campagne, venir troubler les religieuses jusque dans leur lit, ou présider les cérémonies du sabbat. "Les démons se forment tout subit en ce qui leur plaît, écrit Ambroise Paré, souvent on les voit se transformer en serpents, crapauds, chats-huants, corbeaux, boucs, ânes, chiens, chats, loups, taureaux; ils se transmuent en hommes et aussi en anges de lumière".



Pour sa part, Satan adoptait fréquemment l'extérieur du loup; de cet animal redoutable, méchant et simulateur, qui symbolise les faux prophètes, les esprits cauteleux. Il attachait, bien entendu, le plus grand prix à se trouver des imitateurs. Pourtant, à l'inverse des dieux du paganisme, ce ne sont point les mortelles qu'il transformait en ourses ou en génisses, mais ses propres séides qui jouissaient d'elles sexuellement, et de surcroît les dévoraient. Car les loups-garous étaient friands de la chair des bergères, sans négliger pour autant, bien au contraire, celle des petits pâtres... Tel leur animal totémique, les loups-garous étaient doués d'une étonnante mobilité et se déplaçaient le plus souvent par bandes. " En marchant ils laissent sur la terre la trace des loups, font les ravages et cruautés des loups,  étranglent les chiens, coupent la gorge avec les dents aux jeunes enfants, prennent goût à la chair humaine comme les loups, ont l'adresse et la résolution à la face des hommes d'exécuter de tels actes.  Et quand ils courent ensemble, ils sont accoutumés de départir de leurs chasse les uns aux autres..."(Histoires admirables, Paris, 1600, tome I).


La possession diabolique, relativement fréquente, entraînait de son côté l'émission de cris et de hurlements au moment de la transformation de l'homme en animal. Ainsi le Diable créait-il l'autosuggestion nécessaire, entraînant dans la métamorphose ceux qui en éprouvaient la phobie.
La bestialité, dont les résultats ne faisaient pas de doute, constituait par ailleurs un mode idéal de procréation des loups-garous. D'après leurs aveux, les plaisirs que ces derniers prenaient avec les louves étaient aussi intenses, sinon plus, que ceux qu'ils éprouvaient avec les femmes, et certains magiciens, soucieux d'éprouver des jouissances nouvelles, n'hésitaient pas à transformer leurs compagnes en animal domestique. Ce coïte bestial aboutissait, disait-on , à l'apparition de monstres ou d'êtres hybrides reconnaissables à l'exagération de leur pilosisme (hypertrichose) et à leur dégénérescence physique. Enfin, l'onguent, que le Diable remettait à ses nouveaux amis après la signature du pacte et l'imposition de la marque, leur permettait d'opérer très aisément la métamorphose. Ou, tout au moins, de croire, durant leurs rêves, qu'ils s'étaient mués en loups-garous. 






mardi 8 novembre 2016

Méphistophélès


L'un des principaux seigneurs de l'Enfer, démon de la raillerie méchante, du mépris de la vertu, et du scepticisme, popularisé par les opéras issus de la légende faustienne et de l'oeuvre de Goethe. Dans cette dernière, Méphistophélès déclare: "Je suis l'esprit qui toujours nie; et c'est avec justice, car tout ce qui existe est digne d'être détruit; il serait donc mieux que rien n'existât. Ainsi tout ce que vous nommez péché, destruction, bref ce qu'on entend par mal, voilà mon élément"



dimanche 6 novembre 2016

Dieu Lucifer

 

Te voilà tombé du ciel
Astre brillant, fils de l'aurore !
Tu es abattu à terre,
Toi, le vainqueur des nations !
Tu disais en ton coeur: Je monterai au ciel,
J'élèverai mon trône au-dessus des étoiles de Dieu;
Je m'assiérai sur la montagne de l'assemblé,
A l'extrémité du septentrion;
Je monterai sur le sommet des nues,
Je serai semblable au Très-Haut.
Mais tu as été précipité dans le séjour des morts
Dans les profondeurs de la fosse...

Le terme Lucifer qui, dans l'Antiquité, désignait la planète Vénus est parfois donné à Jésus, qualifié de Lucifer matutinus ou de Lucifer qui nescit occasum (Lumière qui ignore le déclin). 

En fait, je ne vais pas écrire ce qui est dans le livre des perdants, mais qui est vraiment le Dieu de ce monde. Oubliez, effacer tout ce que vous avez entendu parler de Satan. Mais surtout, savent que Lucifer et Satan sont le même Dieu, et il n'y a pas d'autre! Ils vous trompent tout le temps, faisant croire que le dieu des chrétiens existe. Satan est le seul Dieu et assurez-vous qu'il est bon! Il n'y a pas deux côtés, mais une seule voie de salut. 



Comme la clarté du jour se change en une profonde nuit
Au moment où disparaît le soleil;
Ainsi, tandis que Lucifer tombe dans l'abîme,
Sa beauté se transforme en une laideur repoussante.
Son rayonnant visage devient un mufle féroce;
Ses dents, des pointes acérées, faites pour rougir le métal,
Ses pieds, ses mains se changent en griffes;
Les couleurs irisées de son vêtement deviennent une peau noirâtre;
De son dos, hérissé de poils, partent deux ailes de dragon...
Son corps réunit en un seul monstre
Les formes hideuses de sept animaux:
Un lion plein d'orgueil, un porc glouton et vorace,
Un âne paresseux, un rhinocéros enflammé de colère,
Un singe lascif et sans pudeur, un dragon rongé par l'envie,
<un loup image de l'avarice sordide...

(texte mentionné et traduit par Louis Maeterlinck, Péchés primitifs, pp. 58-59).

Chacun avec son Lucifer, et sa façon de lui rendre hommage.
Mario Rapisardi devait dans son Lucifer, composé à la fin du XIX siècle, s'efforcer de rivaliser avec l'Hymne à Satan, de Carducci. Voici quelques extraits de son poème:

"J'étais encore dans les cieux, beau de tous les rayonnements. La vie du ciel était sourire et lumière, parfums et harmonie, et tous étaient bercés dans une mer d'oisiveté et de fleurs, se disant bienheureux. Moi seul, sprit inquiet, indifférent à cet avril, à ce bouquet éternel, je sentais, dans mon âme superbe, un vide mystérieux, une mer sans bornes, comme une solitude infinie tout autour de moi, en moi: si j'avais connu
 l'amour, peut-être dans mon coeur je l'aurais reconnu, ce jour-là. Le ciel me parut une petite chose, misérable la vie de l'éternité..."

" In Nomine Dei Nostri Satanas Luciferi Excelsi "





vendredi 4 novembre 2016

Hymne à Pan




Inspiré par Le Grand Dieu Pan, roman initiatique d'Arthur Machen, ce poème rédigé par Aleister Crowley _ qui selon ses propres dires s'assimilait au grand Tout _ fut lu devant ses disciples, lors de ses funérailles à Brighton, en 1947. En voici le début, traduit par Pierre Mariel.

" Frissonne sous la volupté joyeuse de la lumière,
   O homme ! Homme à moi !
   Viens, surgissant de la nuit de Pan,
   Io Pan ! Io Pan !
   A travers les mers, viens de Sicile et d'Arcadie !
  Tel Bacchus, vagabondant avec ta garde de faunes,
  De panthères, de nymphes et de satyres,
  Sur un âne d'un blanc de lait.
  A travers les mers, viens à moi, à moi,
  Viens avec Apollon en robe nuptiale
  (Berger et sorcière)
  Viens avec Artémis, chaussée de soie,
  Et lave ta cuisse blanche, ô dieu splendide,
  A la lune des bois, sur le mont de marbre,
 Dans l'eau creuse et neuve de la source ambrée ... "



" In Nomine Dei Nostri Satanas Luciferi Excelsi "


Hymne à Satan

Poème célèbre composé par Giosue Carducci (1835-1907), dont les extraits suivants furent traduits par Domenico Margiotta.


" Vers toi, principe immense de l'être, matière et esprit, raison et sens; pendant que le vin scintille dans les coupes, comme l'âme au fond de la prunelle; pendant que sourient la terre et le soleil et qu'ils échangent des paroles d'amour; pendant que partout, venant des montagnes, court un frémissement de mystérieux hyménée, et que palpite la plaine féconde; vers toi, ô Satan, mon vers hardi s'élance; je t'invoque, ô Satan, roi de notre festin !"
...
" Dans la matière qui jamais de dort, Satan, roi des miracles de la nature, Satan seul vit; c'est lui qui nous anime, c'est lui qui règne dans la lueur tremblante d'un oeil noir, soit que languissant il se dérobe et résiste, soit que vif et plein de désirs il provoque et presse. "
...
" Bel et horrible monstre, il se déchaîne, il parcourt les océans, il parcourt la terre; éclatant et fumeux comme les volcans, il franchit les mots, il dévore les plaines, il vole par-dessus les abîmes; puis il pénètre dans des antres inconnus, à travers des routes profondes; et il en sort; et, indompté, il pousse un cri pareil à l'ouragan; il passe, ô peuples, Satan le Grand ! Il passe bienfaisant, de pays en pays, sur son char de feu que rien ne peut arrêter. "
...
" Salut, ô Satan, ô rébellion, ô force vengeresse de la raison. Que montent sacrés vers toi, notre encens et nos voeux ! Satan tu as vaincu le Jéhovah des prêtes ! "

" In Nomine Dei Nostri Satanas Luciferi Excelsi "